top of page
Rechercher

Aenigma

Soupçon de brise, comme un froissement d’aile sur son visage. Il pourrait

s’arrêter là, ou, à tout le moins, ralentir son allure. Pourquoi un pas si rapide,

si déterminé ? Il marche, comme s’il s’apprêtait à faire la rencontre de sa vie,

comme s’il tentait de rattraper les désirs auxquels il ne croyait plus pouvoir

aspirer. Lui qui, il y a quelques heures encore, bullait sur un lit d’hôtel,

apathique et aboulique, portant son regard du plafond grisâtre à la fenêtre

ouverte qui permettait d’entrevoir le ciel taquiné par les ondulations des deux

rideaux. Cette fenêtre qui laissait entrer et circuler l’air du dehors, vivifiant,

dans cette chambre qu’il avait alors qualifiée de chambre à air. Il avait souri,

content du jeu de mots.

Puis, tout à coup, un souvenir, venu d’on ne sait où, confus, comme émergé

d’un coma et qui s’était affirmé de plus en plus précis, de plus en plus

pressant. Ç’avait été le déclencheur. Alors, tel un gros insecte qui décolle, il

avait lentement soulevé son corps pour quitter la couche sur laquelle il s’était

affalé.

Désormais, il marche, le regard fixe, le pas pressé. Il ne voit pas l’âpreté

tantôt verdoyante, tantôt dépouillée des montagnes. Il n’entend pas les

chants éoliens que le foehn entonne à travers les reliefs. Il ne sent pas la

fragrance opulente qui s’offre à ses narines. Il se laisse porter par cette

énergie que lui a insufflée ce souvenir, vaporeux et inquiétant tel un fantôme.

Robert Gerin (Adhérent à la MJC)


Mars - 2021


43 vues0 commentaire

Posts récents

Voir tout
Post: Blog2_Post
bottom of page